Il doit exister autant d’histoires, voire de légendes, sur l’origine du premier sirop d’érable, qu’il y a de tribus d’amérindiens au Québec et régions limitrophes des actuels Canada et États Unis.
L’une d’entre elles nous raconte qu’un indien dans le bois aperçu un écureuil très occupé à lécher une petite coulée de sève d’érable sur un tronc, qu’il goûta lui-même et appréciât également. Une autre nous parle de Woksis, chef indien iroquois, qui par un froid matin de fin d’hiver, alla récupérer son tomahawk qu’il avait l’habitude de planter chaque soir dans le tronc d’arbre le plus proche de son tipi. Ce matin-là, il fût surpris car l’arbre, un érable à sucre, pleurait de sa blessure, et ses larmes étaient délicieusement sucrées.
Quoiqu’il en soit, ce sont les amérindiens qui ont appris aux premiers colons européens tout l’intérêt à se servir de cette sève d’érable. Les amérindiens fixaient sous l’entaille faite au tomahawk un petit copeau de bois (l’ancêtre du chalumeau) pour diriger la sève d’érable vers un petit récipient.
Les colons apprirent à bouillir cette sève d’érable pour réduire sa teneur en eau d’érable, et n’en conserver que le sirop d’érable, plus épais mais tellement plus sucré. Ils couraient les sucres, selon l’expression, en cette fin d’hiver, en utilisant des chalumeaux en bois de cèdre appelés goutterelle ou goudrelle. D’érable en érable, chaussés de raquettes traditionnelles, les colons du Québec recueillaient la sève d’érable et allaient ensuite dans leur petite et rudimentaire cabane à sucres, pour le faire bouillir dans des chaudrons en fer. Ce sirop d’érable bien chaud était ensuite coulé dans de petits moules en bois, taillés à la main dans les familles, et transmis précieusement de génération en génération. Ces moules en bois dur avaient toutes sortes de formes, et une fois démoulés, le sirop d’érable était conservé pour toute l’année en petits sucres de formes diverses.
Puis ces méthodes traditionnelles évoluent très vite vers le milieu du vingtième siècle. Le chalumeau en bois de cèdre fait place à un chalumeau en aluminium, le seau de récolte en bois est abandonné pour une chaudière métallique plus solide et souvent plus légère en aluminium. La cabane à sucre, elle aussi, se transforme, avec la disparition du lourd chaudron en fer, remplacé de plus en plus par un évaporateur plus sophistiqué et plus fiable.
Puis apparaissent les tubulures, amenant directement la sève d’érable à l’évaporateur, par un réseau entre les érables. Ce système du tube plastique sous pompage à vide va remplacer les chevaux et les tonneaux, les tracteurs et les seaux.